Châtiments corporels des enfants à Djibouti

DERNIÈRE MISE À JOUR : juin 2018

 

Résumé des réformes juridiques nécessaires à l’obtention d’une interdiction totale

L’interdiction reste à appliquer dans le cadre familial, les différentes structures d’accueil, les garderies, les établissements pénitentiaires et, éventuellement, les écoles.

L'article 475 du Code Civil 2018 se réfère aux « droits d'éducation des parents sur l'enfant ». Il convient de modifier cette disposition afin que la loi énonce clairement qu’aucune forme de châtiment corporel n'est acceptable en matière d'éducation des enfants. De plus, l'interdiction doit être adoptée pour tous les châtiments corporels appliqués par les parents et autres adultes ayant la garde d’enfants.

Autres structures d'accueil – La législation de l'ensemble des structures d’accueil offrant une prise en charge alternative (familles d'accueil, institutions, lieux sûrs, gardes d'urgence, etc.) doit faire apparaître cette interdiction.

Garderie - Les châtiments corporels doivent être interdits dans toutes les structures d'accueil de la petite enfance (crèches, garderies, écoles maternelles, établissements préscolaires, centres familiaux, etc.) et dans toutes les structures accueillant des enfants plus âgés (centres de jour, services de garde après l'école, etc.).

Écoles – La législation doit interdire les châtiments corporels dans tous les établissements d'enseignement (publics et privés).

Établissements pénitentiaires – L'interdiction des châtiments corporels doit aussi être appliquée dans le cadre des mesures disciplinaires, dans tous les établissements accueillant des enfants en conflit avec la loi.

Légalité actuelle des châtiments corporels

Foyer

Les châtiments corporels au sein du foyer sont légaux. Selon l'article 475 du Code civil n° 003/AN/18/8 L 2018 (traduction non officielle) : « L’autorité [parentale] appartient au père et à la mère de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité. Les parents ont, à l'égard de leur enfant, un droit et un devoir de garde, de surveillance et d'éducation. » Cette disposition doit être modifiée pour interdire de façon claire tout châtiment corporel dans l'« éducation » des enfants. L'acceptation quasi universelle d'un certain degré de violence dans l'éducation des enfants nécessite qu'il soit clairement stipulé dans la loi qu'aucun degré de châtiment corporel n'est acceptable. Il ne semble y avoir aucune confirmation dans l'article de loi n° 152/AN/02 2002 (modifiée en 2014) du Code de la famille ni dans l'article de loi n° 59/AN/94 1995 du Code pénal d'un « droit » des parents de punir ou de discipliner les enfants.

Le Code sur la Protection juridique des mineurs (loi n° 95/AN/15/7 L) a été adopté en 2015. Il définit les mauvais traitements contre un enfant comme : « la torture, la violation de son intégrité physique, la détention, la privation de nourriture ou tout acte de brutalité pouvant affecter l'équilibre affectif, moral ou psychologique de l'enfant » (article 14, traduction non officielle). Selon l'article 15 (traduction non officielle) : « est considéré comme une victime de mauvais traitements l'enfant qui a subi une blessure corporelle et/ou une punition cruelle ». Ces dispositions, ainsi que d'autres dispositions relatives à la lutte contre la violence et les sévices (dans ce Code, le Code civil de 2018, le Code de la famille de 2002, le Code pénal de 1995 et la Constitution de 1992), ne sont pas interprétées comme interdisant les châtiments corporels dans le cadre de l'éducation des enfants.

 

Structures de protection de remplacement

Les châtiments corporels ne sont pas expressément interdits dans les structures assurant une protection de remplacement. Les parents peuvent légalement avoir recours aux châtiments corporels.

 

Garderies

Les châtiments corporels ne sont pas explicitement interdits dans les services d’accueil de la petite enfance et dans les services de garde de jour pour les enfants plus âgés.

 

Écoles

Dans les écoles, les châtiments corporels seraient interdits par des règlements applicables à tous les établissements d'enseignement,[1] mais nous n'avons pas été en mesure de le confirmer. Dans la loi 96/AN/00/4e L 2000, les châtiments corporels ne sont pas expressément interdits dans le système éducatif.

 

Établissements pénitentiaires

L'utilisation des châtiments corporels comme mesure disciplinaire n'est pas explicitement interdite dans les établissements pénitentiaires, y compris dans le Code sur la Protection juridique du mineur 2015. Le Code pénal et le Code de procédure pénale sont en cours de révision.[2]

 

Peine criminelle

Le recours aux châtiments corporels comme peine pour sanctionner une infraction est illégal. Il n'existe aucune disposition concernant les châtiments corporels juridiques dans l'article n° 59/AN/94 du Code de procédure pénal, ou dans l'article n° 59/AN/94 1995 du Code pénal.

 

[1] 23 septembre 2008, CRC/C/SR.1347, Compte rendu de l'examen réalisé par le Comité des droits de l'enfant, paragr. 48

[2] 24 mai 2018, A/HRC/WG.6/30/L.8 Version non éditée, rapport préliminaire du groupe de travail, paragr. 9

Examen périodique universel du bilan de Djibouti en matière de droits de l’homme

La situation de Djibouti a été examinée lors du premier cycle de l'Examen périodique universel, en 2009 (4e session). Ont été formulées les recommandations suivantes :[1]

« Adopter et mettre en œuvre des textes législatifs et des politiques en faveur des enfants, en particulier concernant l’enregistrement des naissances, la violence contre les enfants, la justice des mineurs, les enfants des rues, pour ne citer que quelques domaines (Slovénie), et envisager d’adopter une législation qui interdise toute forme de violence à l’égard des enfants, y compris les châtiments corporels, et qui préconise d’autres moyens de discipline (Brésil) »

Le Gouvernement n'a pas formellement accepté ni rejeté ces recommandations.

Le deuxième cycle de l'examen a eu lieu en 2013 (session 16). Aucune recommandation n'a été faite concernant les châtiments corporels infligés aux enfants. Cependant, les recommandations suivantes ont été faites et acceptées par le gouvernement :[2]

« Poursuivre la révision de ses lois nationales afin d'en assurer la conformité avec les obligations qui lui incombent en vertu du droit international des droits de l'homme (Turkménistan) ;

« Renforcer les programmes visant à promouvoir et à protéger les droits des enfants (Algérie) ;

« Redoubler d'efforts pour prévenir, combattre et réprimer les violences envers les femmes et les enfants, et combattre efficacement les pratiques traditionnelles préjudiciables aux femmes, en particulier dans les régions rurales (Togo) »

Le troisième cycle de l'examen a eu lieu en 2018 (session 30). Les recommandations suivantes ont été ajoutées :[3]

« Mettre pleinement en œuvre le Code de protection juridique des mineurs et prendre des mesures visant à éradiquer les pratiques préjudiciables telles que le mariage des enfants et les châtiments corporels infligés aux enfants, en toutes circonstances (Namibie) »

« Faire cesser les châtiments corporels contre les enfants en toutes circonstances et encourager les formes de discipline non violentes (Zambie)  ;

« Renforcer et améliorer la législation concernant la protection des enfants, en particulier l'abolition des châtiments corporels à leur encontre (Liban)"

Le Gouvernement examinera ces recommandations et apportera une réponse avant la 39e session du Conseil des droits de l'homme qui aura lieu en septembre 2018.

 

[1] 5 octobre 2009, A/HRC/11/16, Rapport du groupe de travail, paragr. 68 (5)

[2] 8 juillet 2013, A/HRC/24/10, Rapport du groupe de travail, paragr. 143 (20), 143 (73) et 143 (81)

[3] 24 mai 2018, A/HRC/WG.6/30/L.8 Version non éditée, Rapport préliminaire du groupe de travail sur l'Examen périodique universel, paragr. 129 (180), 129 (190) et 129 (191)

Recommandations par les organes de traités

Comité des droits de l'enfant

(7 octobre 2008, CRC/C/DJI/CO/2, Observations finales sur le deuxième rapport, paragr. 35 et 36)

« Le Comité prend note de l'information donnée par l'État partie, à savoir que les châtiments corporels ont été interdits à l'école et que le Plan d'action dans le domaine de l'éducation pour 2006-2008 prône la mise en œuvre de mesures interdisant les châtiments corporels. Néanmoins, le constat que les enfants subissent toujours des châtiments corporels, en particulier au sein de leur foyer, reste, pour lui, préoccupant.

« Le Comité recommande à l'État partie d'interdire explicitement par voie législative toute forme de violence à l'égard des enfants, y compris les châtiments corporels, et ceci en toutes circonstances, notamment au sein de la famille, à l'école, dans les lieux de protection de remplacement et les lieux de détention, et de faire réellement appliquer ces lois. Il lui recommande aussi d'intensifier ses campagnes de sensibilisation afin de promouvoir le recours à des formes de sanction respectueuses de la dignité humaine de l'enfant et conformes à la Convention, en tenant compte de l'Observation générale n° 8 (2006) du Comité sur le droit de l'enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiment. »

 

Comité contre la torture

(22 décembre 2011, CAT/C/DJI/CO/1, Observations finales sur le rapport initial, paragr. 23)

« Le Comité note avec préoccupation que, selon l'interprétation des dispositions du Code pénal (1995), du Code de la famille (2002) et de la Constitution (art. 16), l'utilisation des châtiments corporels comme mesure disciplinaire n'est pas interdite au sein de la famille.

L'État partie devrait envisager de modifier son Code pénal et son Code de la famille révisé en vue d'interdire le recours aux châtiments corporels en toutes circonstances, y compris au sein de la famille, et de sensibiliser le public à des formes de discipline positives, participatives et non violentes. »

 

Comité des droits de l'homme

(19 novembre 2013, CCPR/C/DJI/CO/1, Observations finales sur le rapport initial, paragr. 14)

« Le Comité constate avec préoccupation que les châtiments corporels ne sont pas expressément interdits dans l'État partie. Il se déclare préoccupé par le fait que les châtiments corporels restent tolérés au sein de la famille, où ils sont traditionnellement pratiqués, bien que non signalés (art. 7 et 24).

L'État partie doit prendre des mesures concrètes pour faire cesser les châtiments corporels en toutes circonstances, y compris au sein de la famille. Il doit promouvoir des méthodes de discipline non violentes et mener des campagnes d'information pour sensibiliser le public aux effets néfastes de toute forme de violence à l'égard des enfants. »

Études sur la prévalence/attitudinales au cours des dix dernières années

Aucune étude recensée.

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