De nouvelles données montrent une baisse modeste mais importante des châtiments corporels en Tunisie, qui touchent des centaines de milliers d’enfants

Read this blog in English

 

En Tunisie, le 12 février 2024, une étape importante a été franchie lorsque le ministère de l'Économie et de la Planification, l'Institut national de la statistique et l'UNICEF ont présenté les résultats de la cinquième enquête par grappes à indicateurs multiples (MICS), mettant en lumière le bien-être des mères et des enfants dans le pays.

Cette enquête exhaustive, qui porte sur 183 indicateurs cruciaux, a révélé une tendance positive en matière de protection de l'enfance. Il y a notamment eu une réduction du recours aux pratiques disciplinaires violentes - de 94 % en 2012 à 88 % en 2018 et 81 % en 2023 - et une augmentation de l'adoption d'alternatives non violentes. Malgré ces progrès, les données soulignent que 8 enfants sur 10 en Tunisie sont toujours confrontés à des méthodes disciplinaires violentes.

Il y a notamment eu une réduction du recours aux pratiques disciplinaires violentes - de 94 % en 2012 à 88 % en 2018 et 81 % en 2023

De même, le pourcentage de parents tunisiens qui estiment que les châtiments corporels sont nécessaires pour éduquer un enfant est passé de 21 % en 2018 à 19,7 % en 2023, ce qui indique une tendance positive vers une plus grande sensibilisation et acceptation des méthodes disciplinaires non violentes. Bien que cette réduction soit encourageante, il est préoccupant de constater qu'environ 1 parent tunisien sur 5 continue de croire que les châtiments corporels sont essentiels à l'éducation des enfants.

Les statistiques révèlent une baisse globale modeste mais significative d'environ 7 % des mesures disciplinaires violentes, ce qui se traduit par une diminution d'environ 240 000 enfants de ces pratiques. Il est particulièrement encourageant de constater la diminution de près de 10 % des cas de violence grave, ce qui équivaut à environ 330 000 enfants de moins qui subissent des violences graves chaque mois.

Il est particulièrement encourageant de constater la diminution de près de 10 % des cas de violence grave, ce qui équivaut à environ 330 000 enfants de moins qui subissent des violences graves chaque mois.

 

Auteur invité

Antoine-Delige-UNICEF

Antoine Deliege, PhD

Chef de la protection de l'enfance, UNICEF Tunisie

https://www.linkedin.com/in/antoinedeliegeunicef/

MICS_Discipline violente1 Tunisia

MICS-Discipline violente2 Tunisia

MiCS_Discipline violente3 Tunisia

Ces chiffres montrent à quel point les interventions à grande échelle telles que la législation et sa mise en œuvre par le biais de mesures nationales et systémiques peuvent avoir un impact sur un très grand nombre d'enfants, même lorsque les progrès ne sont pas aussi rapides qu'on pourrait le souhaiter. Ils soulignent également l'importance d'une collecte cohérente de données et l'impératif de surveiller l'indicateur 16.2.1 des ODD, qui suit le nombre d'enfants victimes de mesures disciplinaires violentes au cours du mois écoulé. À l'heure actuelle, seuls 89 pays dans le monde surveillent cet indicateur chaque année, ce qui souligne la nécessité urgente d'un suivi universel pour préserver le bien-être des enfants.

Ces progrès ne sont pas le fruit du hasard. Le gouvernement tunisien s'efforce d'améliorer le bien-être des enfants par le biais de plusieurs initiatives clés.

Ces progrès ne sont pas le fruit du hasard. Le gouvernement tunisien s'efforce d'améliorer le bien-être des enfants par le biais de plusieurs initiatives clés. Dans le domaine des réformes juridiques, la Tunisie a pris des mesures proactives pour protéger les droits de l'enfant. L'adoption de la loi n° 2010-40 du 26 juillet 2010 a explicitement abrogé la clause qui permettait de « corriger un enfant par des personnes ayant autorité sur lui » et a érigé en infraction pénale le fait d'agresser un enfant, même légèrement. Elle fournit une base juridique solide pour lutter contre la violence à l'égard des enfants et garantit que les châtiments corporels sont illégaux dans tous les contextes, y compris à la maison, à l'école, dans les milieux de protection de remplacement et dans les établissements pénitentiaires.

La loi n° 2017-58 du 11 août 2017 relative à l'élimination des violences faites aux femmes représente également une étape importante dans la lutte contre les violences conjugales et la protection des droits des femmes et des enfants en Tunisie. Ces lois sont essentielles à la promotion d'une culture de la non-violence et du respect de la dignité des enfants.

 

 

 

Les initiatives du gouvernement vont au-delà des réformes législatives et ce cadre juridique s'aligne sur l'engagement de la Tunisie à favoriser un environnement stimulant pour ses jeunes. Le gouvernement a mené des campagnes de sensibilisation comme la récente campagne nationale de lutte contre la violence à l'égard des enfants, intitulée « Il grandira, mais il n'oubliera pas. Il a également mis en œuvre des programmes tels que des initiatives parentales positives et des allocations familiales pour les familles vulnérables. En 2023, le ministère des Affaires sociales a élargi la prestation universelle pour enfants à tous les enfants âgés de 6 à 18 ans inscrits au programme national de protection sociale AMEN Social, portant la couverture à 422 683 enfants issus de ménages vulnérables et marquant une augmentation de 250 % du nombre de bénéficiaires, touchant plus de 18 % des enfants tunisiens âgés de 6 à 18 ans. Ces efforts visent à responsabiliser les parents, à les sensibiliser aux méthodes de discipline efficaces et à soutenir les familles dans le besoin, favorisant ainsi un environnement plus sûr et plus stimulant pour les enfants tunisiens.

Alors que nous réfléchissons aux progrès réalisés jusqu'à présent, il est impératif de reconnaître que le chemin vers une protection complète de l'enfance est un effort continu. Le dévoilement des résultats de l'enquête par grappes à indicateurs multiples est à la fois une célébration des progrès accomplis et un rappel poignant du travail qui nous attend. En s'appuyant sur la détermination collective du gouvernement, de la société civile et des partenaires internationaux, la Tunisie est prête à tracer la voie vers un avenir où chaque enfant peut s'épanouir sans violence ni adversité.

 

 

Campagne nationale "Il grandira mais il n'oubliera pas"